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Le blog de Banta-WAGUE

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C'est l'espace idéal pour partager le plus cher au monde avec mes chers frères, amis, sœurs et le monde entier ; celui du savoir. B.W


Le président Abdoulaye Wade et les chefs religieux

Publié par Banta-WAGUE sur 25 Novembre 2013, 16:36pm

Catégories : #Politique et religion au Sénégal

Par Banta Wague, Université Michel de Montaigne Bordeaux 3, 2009.

    En interrogeant la politique sénégalaise et l’action gouvernementale depuis l’alternance en mars 2000 et l’arrivée au pouvoir d’un homme politique libéral, maître Abdoulaye Wade, nous trouvons des changements majeurs.

Le professeur Samb souligne qu’« En tant qu’État laïque, la République du Sénégal ne professe aucune option religieuse au détriment d’une autre et ne se met au service d’aucune confession religieuse »[1]. Mais dès le début du mandat de l’actuel président, le problème de professer une religion ou une confession au détriment d’une autre s’est clairement posé. Nous affirmons que l’avènement de Me Wade au pouvoir des nouveautés dans la pratique de la laïcité au Sénégal et la relation entre temporel et spirituel ont vu le jour.

Dans ce chapitre nous allons analyser cette relation particulière entre le président Wade et son marabout, feu Serigne Saliou Mbacké.

Le président Wade et la confrérie mouride, un choix de conviction ou politique

            Le jour de l’élection historique en mars 2000, le président Wade a rendu visité à son guide spirituel. Une visite à la capitale du Mouridisme pour remercier Serigne Saliou Mbacké, ce qui donne une image forte d’un chef d’Etat qui se déclare être l’un des disciples de cette confrérie. Cette visite a été commentée par plusieurs organes de presse locale. Ibrahima Sarr, analyse les articles de la presse sénégalaise à ce sujet et nous rapporte que : « Abdoulaye Wade est allé rendre visite à son marabout, le khalife général des mourides, Serigne Saliou, le jour de la reconnaissance de Abdou Diouf de sa propre défaite électorale, en appelant son adversaire pour le féliciter. Cette visite du président fraîchement élu a largement fait la « une » des quotidiens.

À la « une » de son édition du 21 mars 2000, Le Matin titre : « Serigne saliou intronise Wade » quant à Sud Quotidien, il titre à la « une » de son édition datée du même jour « première nuit du vainqueur à Touba ». Au-delà de l’information, ce qui suscite surtout la curiosité des lecteurs, c’est la photo à la « une » du Matin. On y voit Wade, assis à même le sol, adoptant la posture du njepelu[3] discutant avec le saint homme bien calé dans son fauteuil. Le cadrage montre bien que la photo[4] a été prise sur le vif pour immortaliser le face-à-face entre ces détenteurs des pouvoir temporel et spirituel. Mais si l’on se fie à la posture des deux hommes, on constate que c’est le marabout qui détient bien l’autorité. Cela semble normal puisque Wade s’est rendu à la ville sainte en tant que talibé pour remercier le marabout d’avoir contribué, par ses prières, à son succès électoral. Il faut préciser que dans la doctrine mouride le talibé doit une soumission absolue, une obéissance totale à son marabout ou Serigne pour obtenir la grâce »[5]. Le même auteur écrit que : « Cette conception du pouvoir explique la visite de Wade venu recueillir les prières du marabout avant d’entamer son mandat présidentiel. Le porte-parole de Wade à l’occasion Me Madické Niang, déclarait à la presse que le nouveau président, en plus de remerciements à Serigne Saliou, a sollicité des prières « afin de disposer de moyens physiques et intellectuels d’atteindre son objectif qui est le bien-être des sénégalais ».

            Dans une société fortement islamisée, les pratiques magico-religieuses font place aux prières du khalife des mourides. Les marabouts descendants des fondateurs des confréries musulmanes sénégalaises sont considérés comme des saints. […] D’où l’importance des prières de Serigne Saliou en faveur de Wade. On assiste à une cérémonie d’investiture avant l’heure »[6].

Il convient de préciser qu’« il ne s’agit pas de njebelu pour le cas précis qui nous concerne. Talibé (disciple) de Serigne Abdou khadre Mbacké, quatrième khalife des mourides, Me Wade à l’occasion du décès de ce dernier, en mai 1990, réitère son acte d’allégeance, à son successeur, Serigne Saliou Mbacké »[7]. Cette précision montre que le président Wade entretenait des relations privilégiées avec son marabout avant son arrivée au pouvoir. Mais à la tête du pouvoir exécutif une telle relation médiatisée a une grande ampleur, surtout lorsque nous savons qu’il existe d’autres marabouts et d’autres confréries au Sénégal. C’est cette attitude du président Wade qui concentre les critiques de beaucoup d’intellectuels.  

Si nous interrogeons l’histoire politique du Sénégal, nous trouvons une position différente de Me Wade qui ne supportait pas le soutien de chefs religieux et leur choix portés au candidat Abdou Diouf lors des élections de 1983. Sur ce sujet l’analyse de Magassouba est remarquable :  « Le leader du P.D.S., que l’attitude des marabouts gênait plus que tout autre dans la mesure où il était le principal adversaire de Diouf, devait se montrer le plus féroce dans ses critiques sans pour autant attaquer, bille en tête, les « maîtres » de Touba et Tivaouane. Il avait laissé ce soin à certains de ses lieutenants qui conseillèrent aux chefs religieux du pays de s’occuper davantage de « leur peau de mouton et de leur chapelet » que de politique »[8]. Une manière de critiquer le rôle politique joué par ces chefs religieux pendant cette période électorale.

La réaction des autres confréries face à l’attitude du président Wade

            Le Sénégal est constitué par plusieurs familles religieuses confrériques. Certaines d’entre elles se divisent et forment des sous confrérie, comme les Bayy Fall qui sont une composante du Mouridiya et les Niassenes du Cheikh Ibrahima Niasse à Kaolack qui sont une composante de la Tidjaniya. Ces confréries vivent en cohabitation harmonieuse depuis bien long temps. En effet, la population sénégalaise est caractérisée par sa longue tradition de la tolérance et sa considération la différence de l’autre. Léon Diouf nous commente cette tolérance dans ces termes : « Cette tolérance, une des caractéristiques les plus essentielles de la société sénégalaise, n’est pas froide distance de personnes qui ignorent. Elle n’est pas non plus la commisération (miséricorde, pitié) condescendance d’une majorité envers une minorité. Elle est, positivement, considération de l’autre et de sa différence, reconnaissance des apports de chacun à bien commun, respect de son semblable. C’est une question de comportement »[15].

L’attitude du président Wade peut-elle provoquer des mécontentements au sein de confréries religieuses au Sénégal ? La réponse dans le cas échéant est positive. Les propos du porte-parole du khalife général des tidjanes, Abdou Aziz Sy Junior, dans le n° 447 du 03 au 09 décembre 2004 de la Magazine Nouvel Horizon, est un témoignage de ce fait. Il a surtout déploré l’absence de discrétion et la méthode médiatisée du président Wade en disant que le président Diouf faisait beaucoup plus de bien matériel pour la confrérie mouride que Me Wade mais en discrétion absolue. : « Je ne comprends pas pourquoi Me Wade tient vaille que vaille à médiatiser ses actes à Touba. Le président Diouf allouait 800 millions, annuellement, à la confrérie mouride, c’est-à-dire beaucoup plus que le président Wade, mais dans la grande discrétion. En médiatisant ses actes, on a l’impression qu’il cherche à froisser, la susceptibilité des autres »[16] dit Junior. Même si ces propos restent à vérifier, cette déclaration d’un chef religieux confirme que : les chefs religieux reçoivent des aides financières de la part du pouvoir politique dirigeante.

Nous pouvons citer dans cette même situation de mécontentements, la révolte des jeunes de la confrérie Layène pour dénoncer la marginalisation de leur confrérie : « On se souvient encore de la « révolte » de la communauté layène (confrérie religieuse implantée principalement dans la Région de Dakar) de 2001, quand certains de ses membres décidèrent de boucher le canal d’évacuation des eaux usées de la station de pompage de Cambérène (ville de la confrérie layène). Les autorités gouvernementales n’avaient pas osé de (les arrêter) à cette époque, malgré les graves menaces qui pesaient sur les populations environnantes. […] Les disciples layènes qui dirigeaient les opérations profitaient de l’occasion pour dénoncer vigoureusement ce qu’ils appelaient de la préférence confrérique du président de la République »[17].

Nous conclusions ce chapitre par la montée au créneau d’un jeune marabout mouride pour dénoncer l’attitude de Me Wade envers la confrérie mouride. Des voix se sont élevées pour dénoncer l’attitude de Me Abdoulaye Wade à l’instar d’un jeune marabout qui a appelé l’actuel khalife général des mourides pour mettre fin à ce qu’il appelle « la politisation du Serigne Touba ». Daouda Thiam, journaliste du L’AS (Quotidien sénégalais) nous rapporte le propos de Serigne Sam Mbacké, leader de NASROUL MINALAHI : « il est temps que le khalife général des Mourides, Serigne El Hadj Bara Mbacké, demande à Me Abdoulaye Wade d’arrêter de politiser Serigne Touba. Il faut que le vénéré guide religieux le somme de cesser de politiser ce que Serigne Cheikh Ahmadou Bamba a de plus cher. Mais pour empêcher l’érection de ce projet qui n’est ni plus ni moins qu’une insulte à l’endroit de la communauté mouride, les talibés doivent se mobiliser comme un seul homme, pour s’opposer à toute idée de délocalisation du site de “Gouy Mouride” »[18].Cette critique[19] de ce jeune religieux au sein de la confrérie mouride, montre que l’attitude du président Wade vis-à-vis des confréries est contestée, voire considérée comme attitude purement politique. 

            Pour Abdou Latif Coulibaly (Journaliste d’investigation de renom, Docteur en communication des Universités canadiennes. Il dirige l’institut supérieur des sciences de l’information et de la communication) : « C’est le moment de le répéter de nouveau avec force : le Sénégal a très mal dans sa laïcité. Celle-ci a été sérieusement malmenée au cours de ces six dernières années qui ont vu le chef se transformer subitement en un talibé obséquieux et soumis prêt à livrer la République à sa confrérie, alors même que celle-ci ne l’a jamais réclamée »[20].

D’autres intellectuels sénégalais déplorent et critiquent cette préférence et appartenance confrérique médiatisée du président de la République, mais la collaboration avec les dignitaires de l’islam sénégalais pour le bien du pays est bien accepté.

 

 [1]Djibril Samb, comprendre la laIicité., p.138.

[3]  Soumission absolue du disciple pour son guide spirituel.

[5] Ibrahima Sarr, La démocratie en débats : l'élection présidentielle de l'an 2000 dans la presse quotidienne sénégalaise, L’Harmattan, 2007, p.287.

[6] Ibid., p. 290.                                                    

[7]Ibid., p. 287.

[8] Moriba Magassouba,L’islam au Sénégal demain les Mollahs, p. 141.

[9] Mody Niang, Qui est cet homme qui dirige le Sénégal. L’Harmattan, Paris, 2006, p.109-110.

[10] Ibid., p. 110.

[11] Il était le numéro 2 du PDS, premier ministre du président Wade entre 6 novembre 2002-21 avril 2004.

[12] Mody Niang, opcit., p. 111.

[13] Ibid., p.112.

[14] Idem., p. 113.

[15] Léon Diouf, Eglise locale et crise africaine, Karthala, Paris, 2002, p. 83.

[16] M. Niang, opcit., 118-119.

[17] Ibid.,

[18] Daouda Thiam, Il est temps que le khalife général des Mourides, Serigne El Hadj Bara Mbacké, demande à Me Abdoulaye Wade d’arrêter de politiser Serigne Touba, article mis en ligne par Ibrahima, 29/04/09. http://www.lasquotidien.com/spip.php?article1591

[19] Le jeune marabout a prononcé ces sollicitations dans le cadre de l’affaire de la mosquée de « Gouy Mouride ». Le président Wade voulait donner le site de cette mosquée aux chinois pour qu’ils construisent leur projet d’un centre de commerce.

[20] Abdou Latif Coulibaly, Une démocratie prise en otage par ses élites Essai politique sur la pratique de la démocratie au Sénégal, Les Editions Sentinelles, Dakar-Fann, 2006, p. 254.

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C
courage mon frére tu fais du bon boulot
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